25/10/2023
Auteurs romantiques, Chateaubriand


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LE GÉNIE DU CHRISTIANISME 1ère partie



Première partie : Dogmes et doctrines
Chateaubriand évoque la beauté et la noblesse morale dit Christianisme dans ses mystères (Trinité, Rédemption, Incarnation), dans ses sacrements (du Baptême à l'Extrême- Onction), dans ses vertus (Foi, Espérance et Charité) et même, en dépit des objections scientifiques, dans la vérité des Écritures (chute originelle, Déluge).

LIVRE V Existence de Dieu prouvée par les merveilles de la nature (extraits)
La volonté organisatrice de DIEU se manifeste dans le spectacle de l'univers, l'instinct des animaux, le chant des oiseaux, la perfection de leurs nids, leurs migrations. N'est-il pas puéril de vouloir démontrer à tout prix la Providence, à la manière de BERNARDIN DE SAINT-PIERRE ? n'y a-t-il pas quelque danger à trop assimiler le christianisme à la religion naturelle? Peu importe à CHATEAUBRIAND qui, fort de ses souvenirs de voyageur et de son talent de peintre, préfère aux arguments théologiques « les raisons poétiques et les raisons de sentiment ». Sous sa plume, le chant des oiseaux devient un hymne à l'Éternel et un enchantement « commandé pour notre oreille » par la Providence. C'est bien « l'Enchanteur » qui apparaît ici.

Chapitre V : Chant des oiseaux (extraits)

La nature a ses temps de solennité, pour lesquels elle convoque des musiciens de différentes régions du globe. On voit accourir de savants artistes avec des sonates merveilleuses, de vagabonds troubadours qui ne savent chanter que des ballades à refrain, des pèlerins qui répètent mille fois les couplets de leurs longs cantiques. Le loriot siffle, l'hirondelle gazouille, le ramier gémit : le premier, perché sur la plus haute branche d'un ormeau, défie notre merle, qui ne le cède en rien à cet étranger ; la seconde, sous un toit hospitalier, fait entendre son ramage confus ainsi qu'au temps d'Évandre ; le troisième, caché dans le feuillage d'un chêne, prolonge ses roucoulements, semblables aux sons onduleux d'un cor dans les bois ; enfin le rouge-gorge répète sa petite chanson sur la porte de la grange où il a placé son gros nid de mousse. Mais le rossignol dédaigne de perdre sa voix au milieu de cette symphonie : il attend l'heure du recueillement et du repos, et se charge de cette partie de la fête qui se doit célébrer dans les ombres. Lorsque les premiers silences de la nuit et les derniers murmures du jour luttent sur les coteaux, au bord des fleuves, dans les bois et dans les vallées ; lorsque les forêts se taisent par degrés, que pas une feuille, pas une mousse ne soupire, que la lune est dans le ciel, que l'oreille de l'homme est attentive, le premier chantre de la création entonne ses hymnes à l'Éternel. D'abord il frappe l'écho des brillants éclats du plaisir : le désordre est dans ses chants ; il saute du grave à l'aigu, du doux au fort ; il fait des pauses ; il est lent, il est vif c'est un cœur que la joie enivre, un cœur qui palpite sous le poids de l'amour. Mais tout à coup la voix tombe, l'oiseau se tait. Il recommence ! Que ses accents sont changés ! quelle tendre mélodie. Tantôt ce sont des modulations languissantes, quoique variées ; tantôt c'est un air un peu monotone, comme celui de ces vieilles romances françaises, chefs-d'œuvre de simplicité et de mélancolie. Le chant est aussi souvent la marque de la tristesse que de la joie : l'oiseau qui a perdu ses petits chante encore ;
c'est encore l'air du temps du bonheur qu'il redit, car il n'en sait qu'un ; mais, par un coup de son art, le musicien n'a fait que changer la clef, et la cantate du plaisir est devenue la complainte de la douleur.


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